Christopher Nolan. Un nom qui aujourd’hui suffit à déchaîner les foules de cinéphiles. Avec Le Prestige, Memento, Inception et la trilogie Dark Knight, il faut admettre que le réalisateur britannique commence à avoir une très belle réputation. Lorsque celui-ci s’est lancé dans ce projet pharaonique de décrire l’avenir de l’humanité, on a pu se dire que ce film l’enterrerait, une idée trop ambitieuse pour être réussie, un crash à la mesure des moyens mobilisés. Et puis les premières notes résonnent, le rideau s’ouvre…
Dans un futur proche, la Terre se meure, la nourriture devient rare, tous les programmes spatiaux et militaires ont été suspendus. Cooper, ex-astronaute, est l’un des nombreux fermiers qui tentent de nourrir une humanité qui se sait condamnée par les tempêtes de sables et la surpopulation. Mais la NASA, qui opère désormais dans le plus grand des secrets, lui offre l’opportunité de participer à l’ultime mission: découvrir un monde habitable à des années-lumière pour y évacuer l’espèce humaine.
2h50 avec pour seul fil conducteur cette quête d’un nouveau monde. D’un avenir meilleur. D’un salut. Car c’est ce qui anime chaque personnage: une fuite en avant dans l’espoir de sauver sa famille, ses amis, ceux qu’on aime, l’humanité ou soi-même. Une lutte contre les éléments, contre le temps, contre une catastrophe inévitable s’engage sous nos yeux.
Même si le récit se veut pseudo-scientifique et dans un futur plausible, on reste dans le champs de la science-fiction. Et pourtant, on ne peut s’empêcher d’éprouver de l’empathie pour les acteurs de cette grande bataille: souffrir de leurs faiblesses, pleurer leurs pertes et prier leur réussite.
D’où vient cette émotion prégnante ?
- Du scénario ? Si Nolan a coécrit avec son frérot le script et qu’on y reconnait la qualité scénaristique des précédentes œuvres, ce n’est pas le point fort du film. Efficace sans être transcendant.
- Des acteurs ? Très gros casting (McConaughey, Hathaway, Chastain, Caine, Damon…), qui joue juste, sans pathos superflu. Mais pas de performance à oscars.
- La musique peut-être ? Hans Zimmer aux manettes, de l’orgue à foison (en 2014, c’est couillu !), une partition magistrale. Mais ça ne fait pas un film.
- La mise en scène ? Effets visuels à gogo, scènes spatiales époustouflantes, gros renforts technologiques. Mais hormis les 10 premières minutes du film (l’incroyable scène du drone) très audacieuses, rien que l’on n’ait pas déjà vu chez Kubrick, Cuarón ou Ridley Scott.
Interstellar est un œuvre qui se construit comme un tout équilibré. On souhaite nous raconter une histoire, on s’en donne les moyens et on engage le spectateur à quitter la terre ferme. Il est même quelque chose de physique: il suffit de constater le silence de la salle qui accompagne le générique et les mines magnifiquement fatiguées des « gens » pour se dire que l’on n’a pas vu un film, on l’a vécu.
Les hommages à 2001, l’odyssée de l’espace sont évidents: la quête spatiale, l’intelligence artificielle, la réflexion sur l’humanité et son devenir, etc. Mais Interstellar ne s’inscrit ni comme une suite, un préquel ou un copier-coller du chef d’œuvre de Kubrick. C’est un autre éclairage, plus contemporain, de notre rapport à l’espace. Avec toujours ce côté musical, majestueux, quasi mystique.
Un opéra. Un tourbillon d’images irréelles, de sonorités surpuissantes et d’instants de grande foi. De bout en bout. Jusqu’à la dernière seconde. Puis le rideau tombe. Les mots se dérobent. IL l’a fait !